Les technologies portables, dominées par les montres connectées, représentent aujourd’hui une industrie de plusieurs milliards de dollars, axée sur le suivi de la santé.
Ces appareils promettent de surveiller divers paramètres tels que le rythme cardiaque, la température corporelle, les cycles menstruels ou encore la qualité du sommeil. Cependant, malgré ces avancées technologiques, de nombreux professionnels de la santé restent sceptiques quant à leur utilité réelle dans les diagnostics médicaux.
L’essor des technologies portables en médecine
Les technologies portables comme les montres connectées et les bagues intelligentes, se positionnent comme des outils révolutionnaires pour surveiller la santé des utilisateurs.
Par exemple, des appareils tels que l’Oura Ring permettent aux utilisateurs de télécharger des rapports détaillés qu’ils peuvent partager avec leurs médecins. Certaines fonctionnalités, comme la détection précoce de variations de température ou de fréquence cardiaque, offrent des indices sur des problèmes de santé potentiels avant même que des symptômes évidents ne se manifestent.
Cependant, les experts en santé, comme le Dr Helen Salisbury, généraliste à Oxford, restent prudents face à cette avalanche de données. Selon elle, les appareils connectés peuvent parfois provoquer une surmédicalisation, en incitant les utilisateurs à consulter pour des anomalies mineures qui ne nécessitent pas d’investigation médicale.
Les risques de sur-surveillance
L’un des problèmes majeurs soulevés par les médecins est la tendance des objets connectés à encourager une surveillance excessive de l’état de santé.
Le Dr Salisbury met en garde contre la création d’une société d’hypocondriaques, où les patients se précipiteraient chez leur médecin à la moindre alerte déclenchée par leur appareil. Elle explique que des variations dans les données, comme une augmentation temporaire du rythme cardiaque, peuvent être causées par des facteurs anodins ou même par des erreurs de mesure.
En outre, les objets connectés ne sont pas conçus pour détecter des maladies graves comme les tumeurs cancéreuses. Le meilleur conseil que ces appareils peuvent offrir reste souvent basique : marcher davantage, maintenir un poids sain et limiter la consommation d’alcool, des recommandations que les médecins répètent depuis des années.
L’impact des faux positifs sur les diagnostics
Bien que les objets connectés aient permis de sauver des vies grâce à leurs capacités de suivi cardiaque ou de détection de chutes, ils génèrent également un nombre important de faux positifs. Ces fausses alertes, souvent provoquées par des mouvements ou des interférences, peuvent inquiéter inutilement les utilisateurs et surcharger les systèmes de santé.
Le Dr Yang Wei, spécialiste des technologies portables à l’Université de Nottingham Trent, souligne que les données collectées par ces appareils ne sont pas toujours fiables. Par exemple, la mesure de la fréquence cardiaque depuis un doigt, comme c’est le cas avec certaines bagues intelligentes, est moins précise que les méthodes standard utilisées dans les hôpitaux.
L’absence de normes internationales
Un autre défi des objets connectés réside dans l’absence de normes universelles pour les capteurs et les logiciels qu’ils utilisent. Cela complique l’intégration des données collectées par ces appareils dans les systèmes de santé traditionnels. Le format des données varie considérablement d’un fabricant à l’autre, rendant leur interprétation et leur utilisation uniformes difficiles pour les professionnels de santé.
Pritesh Mistry, expert en technologies numériques au Kings Fund, estime que bien que les objets connectés puissent soutenir les initiatives visant à décentraliser les soins, leur adoption généralisée nécessitera des investissements dans l’infrastructure technologique et la formation des professionnels de santé.
Les limites de la détection automatisée
Des incidents liés à des erreurs de détection soulignent les limites actuelles de ces technologies. Par exemple, un utilisateur d’Apple Watch a déclenché par inadvertance une alerte à son contact d’urgence alors qu’il conduisait des voitures de course sur un circuit. Ces erreurs mettent en évidence la nécessité de calibrer plus finement les seuils entre incidents réels et fausses alertes.
Ben Wood, qui a vécu cette expérience, appelle à une réflexion collective sur la manière dont les fabricants, les services d’urgence et les utilisateurs peuvent mieux gérer ces technologies à l’avenir.
Un potentiel prometteur malgré les défis
Malgré ces limites, les objets connectés offrent un potentiel immense pour transformer les soins de santé. Dans le cadre des efforts du gouvernement britannique pour encourager les soins en dehors des hôpitaux, des initiatives comme le suivi des patients atteints de cancer à domicile à l’aide de ces appareils pourraient alléger la pression sur les établissements de santé tout en améliorant la qualité de vie des patients.
Cependant, pour que ces technologies atteignent leur plein potentiel, il sera essentiel de développer des cadres réglementaires, d’unifier les standards de données et d’éduquer les utilisateurs sur leurs capacités et leurs limites.
Conclusion
Les objets connectés redéfinissent la manière dont les individus surveillent leur santé, mais ils ne remplacent pas l’expertise humaine.
Bien qu’ils encouragent de meilleures habitudes de vie et offrent des outils innovants pour le suivi de la santé, leur adoption généralisée nécessite une évaluation prudente et une intégration réfléchie dans les systèmes de soins. Pour l’instant, ces technologies restent des compléments prometteurs, mais non sans limites, à la médecine traditionnelle.